18 Mars 2011
Cela va faire 10 ans que Philibert Rabezoza dit Rakoto Frah s'était éteint pour rejoindre la musique universelle. Il était petit, avec un regard lumineux et profond. Des yeux très noirs, pleins de tendresse, de malice et de générosité.
10 ans que le sodina est orphelin. Que deviendront cet instrument et l'art du sodina malagasy ?
Jusqu'à ses derniers souffles, Rakoto Frah ne cessait de souffler dans son sodina.
Sodina, un instrument qu'il fabriquait lui-même, dont il jouait depuis l'âge de sept ans et avec laquelle il fut choisi, il y avait déjà un certain temps, pour illustrer les billets de banque malgaches de mille ariary. Une reconnaissance nationale de son art !
Avant d'être celui que nous l'avons connu, il faisait aussi des petits métiers pour survivre (aide boulanger, ferrailleur ...), du temps de la colonisation à Madagascar (avant le 26 juin 1960).
Comme Rakoto Frah le disait sur la musique et la façon de le jouer :
" J'ai entendu les vieux les jouer. Je ne les interprète pas toujours de la même manière. Je les change un peu, je les arrange à ma façon. Pour moi, la musique. Ça dépend surtout de l'interprète, de la manière de jouer et des instruments. La musique n'est pas du tout figée. "
Depuis sa première sortie de Madagascar en 1967, Rakoto Frah n'avait cessé de porter au-delà de Madagascar son sodina et sa culture ; les 5 continents avaient vu l'homme.
Modestement, Rakoto Frah ne se sentait pas obliger de donner une valeur à ses travaux :
" Je n'ai pas vraiment d'échelle de valeur pour mesurer tout ça. Ce qui est important pour moi, c'est que les gens m'apprécient et que là où on m'appelle j'essaie toujours de faire le maximum pour qu'ils soient contents. "
Rakoto Frah, exactement comme il l'était, répondait toujours présent à toutes les invitations qui lui étaient adressées. Il avait joué notamment avec Manu Dibango, le groupe sud-africain Ladysmith Black Mambazo, les jazzmen David Lindley et Henry Keiser.
Si l'envie vous démange de l'écouter et sentir le souffle vous traversez : cherchez dans les disques Flute Master of Madagascar (GlobeStyle, 1988), The art of Rakoto Frah & Randafison Sylvestre produit au Japon (JVC, 1989), Souffles de vie, avec Solo Razafindrakoto (Musikela, 1998) et Chants et danses en Imerina (Arion, 2000).
Ô Rakoto !